Réduction de la pauvreté et développement économique
Rapport des ministres des Finances du G-7 aux chefs d'État et de gouvernement
Juillet 2000 (version non officielle)
Table des matières
A. Démarche globale en matière de développement.
B. Allégement de la dette des PPTE.
C. Au-delà de la réduction de la dette.
D. Amélioration du contexte du commerce et de l'investissement.
E. Intégration plus rapide à l'économie mondiale.
Annexe L'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés :
Progrès réalisés au chapitre de la mise en uvre.
A. Démarche globale en matière de développement
- En raison de l'évolution remarquable de l'économie mondiale qui a suivi les
progrès rapides en matière de mondialisation, il est essentiel que la communauté
internationale intervienne pour que les pays en développement puissent tirer profit des
forces de la mondialisation et jouent leur rôle dans le système économique mondial.
L'un des principaux objectifs consiste à adopter une démarche prospective et ce,
d'une manière stratégique et intensive, pour faciliter les efforts de ces pays en
vue de réduire la pauvreté de façon soutenue et d'assurer le développement
économique, en plus d'atteindre l'objectif de développement international,
c'est-à-dire réduire de moitié, d'ici 2015, le nombre de personnes qui
vivent dans des conditions d'extrême pauvreté.
- L'expérience acquise démontre l'importance de la croissance
durable comme condition nécessaire pour réduire la pauvreté. Tous les intervenants dans
le domaine du développement doivent insister sur les priorités qui engendreront la
croissance vigoureuse nécessaire pour atteindre les objectifs de l'an 2015. Ces
priorités doivent englober la stabilité macroéconomique, l'encouragement au
développement du secteur privé, la promotion de saines mesures de gouvernance,
l'investissement dans le développement social, l'accélération de la
libéralisation du commerce et le raffermissement des secteurs financiers.
- Bien que la croissance soit un élément essentiel de la lutte contre la
pauvreté, il convient d'accorder davantage d'attention à une répartition plus
équitable des avantages de la croissance. À cette fin, il est essentiel d'appliquer
de bonnes politiques sociales, y compris la mise en place d'institutions,
l'éducation et le perfectionnement des compétences, de même que
l'amélioration de la santé, notamment par la lutte aux maladies infectieuses. Ces
éléments représentent la base de la réduction de la pauvreté et de
l'amélioration de l'équité sociale. L'investissement social assure un
rendement élevé à long terme.
- La lutte contre la pauvreté à l'échelle mondiale exige une démarche
à plusieurs facettes. Pour atteindre cet objectif, les pays démunis doivent établir
leurs propres stratégies globales de réduction de la pauvreté, qui sont centrées sur
les objectifs de développement international. Ces stratégies établiront un lien crucial
entre les politiques sociales et économiques requises pour réduire la pauvreté et
intensifier la croissance. Elles doivent promouvoir la transparence, la
responsabilisation, l'élimination des dépenses inutiles et la saine gouvernance.
Ces stratégies doivent également être élaborées dans le cadre de processus de
participation faisant appel à la société civile. Les institutions financières
internationales (IFI) et les donateurs bilatéraux doivent aider les pays à élaborer et
à mettre en uvre ces stratégies, notamment grâce à une aide technique.
- Pour les pays pauvres très endettés (PPTE), l'allégement de la dette grâce à
l'Initiative améliorée en faveur des PPTE constitue un élément essentiel de
l'établissement d'un cercle vertueux de réduction de la pauvreté et de
développement économique. L'an dernier à Cologne, nous avons convenu de mettre sur
pied l'Initiative visant un allégement rapide et plus généralisé de la dette, et
de dégager des fonds pour la réduction de la pauvreté. Nous soulignons l'appui
accordé à cette initiative par la communauté internationale, l'automne dernier.
- Depuis, l'Initiative a été mise en uvre. Neuf pays ont atteint
des points de décision et touchent, en vertu du nouveau cadre, une aide en vue de la
réduction de la dette qui devrait totaliser plus de 15 milliards de dollars US sur
une base nominale (8,6 milliards de dollars US selon la valeur actualisée nette).
Jusqu'à 11 autres pays pourraient atteindre le point de décision d'ici la fin
de l'année. L'annexe ci-jointe renferme d'autres détails sur l'état
d'avancement de l'Initiative améliorée en faveur des PPTE.
- Nous encourageons les PPTE qui ne l'ont pas encore fait à enclencher
sans tarder le processus en procédant à l'élaboration de stratégies de réduction
de la pauvreté, en étroite collaboration avec la Banque mondiale et le Fonds monétaire
international (FMI) et à profiter par le fait même de la réduction de la dette. Nous
nous préoccupons du fait que certains PPTE sont actuellement aux prises avec des conflits
militaires qui les empêchent de réduire la pauvreté et qui retardent l'allégement
de leur dette. Nous unirons nos efforts pour que le plus grand nombre de pays possible
atteignent leur point de décision, conformément aux objectifs fixés à Cologne, et nous
accorderons toute l'attention voulue à l'évolution des réformes économiques
et à la nécessité d'établir le lien entre l'allégement de la dette et la
réduction de la pauvreté.
- Nous encourageons la Banque mondiale et le FMI à poursuivre leurs efforts en
vue de mettre en uvre rapidement et efficacement l'Initiative. À cet égard,
nous soulignons la mise sur pied, en avril, du Comité mixte de mise en uvre de la
Banque mondiale et du FMI, et nous lui demandons de faciliter efficacement
l'application de l'Initiative en faveur des PPTE et de fournir périodiquement
de l'information sur l'état d'avancement de chaque pays.
- Nous notons les progrès réalisés à l'égard des sommes requises par
les IFI pour mettre en uvre efficacement l'Initiative améliorée en faveur des
PPTE. Nous encourageons une participation efficace et rapide de la part de tous les
créanciers multilatéraux et bilatéraux, notamment les pays qui ne sont pas membres du
Club de Paris. Les ressources relatives à la part du coût de l'allégement de la
dette assumé par le FMI et la Banque mondiale ont été déterminées, et des
contributions appréciables aux besoins en financement d'autres IFI ont été
versées. Nous demandons aux banques multilatérales de développement de s'engager
activement à l'égard de l'Initiative en utilisant au maximum leurs ressources
internes. Nous soulignons les progrès réalisés récemment en vue de mettre au point un
programme de financement qui favorisera l'allégement de la dette des PPTE
d'Amérique latine.
- Nous réitérons notre engagement à fournir dans les plus brefs délais les
ressources que nous avons engagées. Ainsi, nous reconnaissons l'importance d'un
juste partage du fardeau entre les créanciers. Nous encourageons les donateurs
bilatéraux à effectuer de nouvelles contributions au fonds fiduciaire des PPTE.
- Nous réitérons notre engagement à la réduction bilatérale de la dette à
l'intérieur du cadre des PPTE. À cet égard, nous nous sommes engagés à annuler
la dette relative à nos obligations commerciales pouvant être traitées dans le cadre du
Club de Paris. Nous soulignons l'annonce effectuée par certains autres pays, à
savoir qu'ils annuleront également la dette, et nous demandons à d'autres
créanciers d'en faire autant.
- L'aide publique au développement (APD) continuera d'être essentielle pour
appuyer et encourager les efforts des pays démunis en matières de réduction de la
pauvreté et de développement économique. Ainsi, nous soulignons le renversement récent
de la tendance au chapitre de la diminution des niveaux d'aide. Pour faire en sorte
que les pays auxquels l'Initiative s'applique ne soient plus confrontés à un
fardeau excessif de la dette, nous nous sommes engagés à offrir à ces pays une APD
prenant le plus souvent la forme de subventions.
- L'expérience acquise démontre que l'aide économique aux pays
appliquant une saine gestion permet d'intensifier la croissance et d'améliorer
la situation sociale. Les donateurs peuvent intervenir en dirigeant l'aide de façon
plus efficace vers les pays démunis qui font la preuve d'efforts sérieux en vue
d'apporter des réformes économiques et de réduire la pauvreté. Les donateurs
doivent également accroître l'efficacité de leur aide en coordonnant plus
efficacement les mesures d'aide axées sur les programmes bien pensés et mis en
uvre par les bénéficiaires et en simplifiant, et dans la mesure du possible, en
harmonisant les mesures d'aide. [and untying aid to least developed countries with a
concrete fair burden sharing mechanism.]
- Pour assurer l'application de méthodes de prêt responsables, il est
essentiel que les donateurs réitèrent leur engagement à décourager les dépenses non
productives. Ainsi, nous demandons à l'Organisation de coopération et de
développement économiques (OCDE) de faire en sorte que son groupe chargé du crédit à
l'exportation examine le raffermissement des mesures visant à garantir que
l'aide au crédit à l'exportation destinée aux PPTE et à d'autres pays
en développement à faible revenu ne soit pas utilisée à des fins non productives. Le
résultat de cet examen doit être publié, et il pourrait englober l'analyse des
règles et règlements nationaux pertinents. Nous encourageons l'OCDE à exécuter
ces travaux dès que possible. En outre, nous soulignons les efforts déployés par les
IFI et d'autres donateurs afin d'encourager les pays démunis à appliquer des
politiques de saine gestion de la dette pour garantir l'utilisation productive des
ressources.
- Des biens publics mondiaux tels l'environnement et la santé méritent
une attention prioritaire et exigent la participation généralisée des IFI, notamment la
Banque mondiale et les banques régionales de développement, mais également de donateurs
bilatéraux. Pour être efficace, la participation de la communauté internationale dans
le domaine des biens publics mondiaux doit reposer sur les principes de l'avantage
comparatif et de l'établissement de priorités.
- Compte tenu du lien étroit entre la croissance du commerce et de l'investissement
et la croissance économique, le commerce et l'investissement joueront un rôle de
premier plan dans la promotion de la réduction efficace de la pauvreté et de la
croissance économique durable. Nous devons trouver des façons de permettre aux PPTE et
à d'autres pays en développement à faible revenu d'avoir leur mot à dire
dans le commerce mondial et nous devons améliorer l'accès de ces pays aux marchés
internationaux. Nous devons faire en sorte que l'imminente série de négociations de
l'Organisation mondiale du commerce (OMC) favorisent activement les intérêts de ces
pays de sorte qu'ils puissent également tirer profit de la libéralisation du
commerce. Nous devons également favoriser la coopération régionale entre ces pays,
conformément aux règles de l'OMC, qui représentent souvent une première étape
appréciée dans le but de faciliter l'intégration à l'économie mondiale.
Nous demandons aux organismes internationaux pertinents, notamment l'OMC et la Banque
mondiale, d'intensifier leurs efforts en vue d'accroître le potentiel en
matière de commerce dans les pays les plus démunis. Nous devons également appuyer les
efforts des pays pauvres en ce qui touche la mise en place d'un contexte propice à
l'investissement productif.
- En prévision de l'évolution rapide de la mondialisation et de la révolution de
la technologie de l'information (TI), il est important que les pays en développement,
notamment les plus démunis, profitent des avantages issus des nouveautés de la TI et
évitent le fossé informatique. Il est essentiel que la communauté internationale
insiste sur la mise en valeur du potentiel et des institutions, y compris en matière de
TI, comme l'investissement et le capital humain.
- À plus long terme, il faudra veiller à ce que tous les pays en
développement puissent franchir les échelons du développement. Dans bien des pays,
l'épargne nationale et les mouvements des capitaux privés jouent déjà un rôle
important dans le développement du financement. La mise en place du contexte permettant
de rehausser les formes stables de financement et d'investissement privé constitue
un élément clé pour garantir le développement durable.
- Un grand nombre de pays en développement continueront de dépendre de
l'aide à des conditions de faveur dans un avenir prévisible; les IFI doivent
toutefois envisager des façons de permettre à ces pays de participer au marché
financier mondial à l'avenir. L'objectif doit consister à donner des repères
aux pays en développement pour leur permettre de passer de l'isolement à
l'intégration, à la croissance et au développement.
- L'Initiative améliorée en faveur des PPTE, qui a été instaurée à Cologne
l'an dernier, vise à alléger rapidement et de façon généralisée la dette des
PPTE et à faire en sorte que les avantages de l'allégement de la dette soient
utilisés pour réduire la pauvreté. Le lien entre l'allégement de la dette, la
réforme des politiques socio-économiques et la réduction de la pauvreté dans le cadre
du processus d'aide aux PPTE est établi grâce à des documents approfondis portant
sur la stratégie de réduction de la pauvreté. Ces documents sont élaborés par les
PPTE dans le cadre d'un processus auquel participe la société civile, avec le
concours des institutions financières internationales et des donateurs.
- Neuf pays (le Bénin, la Bolivie, le Burkina Faso, le Honduras, la
Mauritanie, le Mozambique, l'Ouganda, le Sénégal et la Tanzanie) ont atteint
leurs points de décision en vertu de l'Initiative améliorée. Pour ces neuf pays,
l'allégement de la dette a été convenu et il représentera des économies
supérieures à 15 milliards de dollars US sur une base nominale (8,6 milliards de
dollars US selon la valeur actualisée nette). Cette somme représente en moyenne une
réduction d'environ 45 % de l'encours de la dette des pays visés, en plus
de l'application des mécanismes classiques d'allégement de la dette. Cette
somme augmentera en raison de la réduction de la dette au titre de l'Aide publique
au développement dont nous avons convenu à Cologne et de notre engagement à éliminer
la dette commerciale admissible des PPTE qui réduiront leur dette en vertu de
l'Initiative.
- En outre, selon les plus récentes estimations du FMI et de la Banque
mondiale, jusqu'à 11 autres pays pourraient atteindre leurs points de décision
d'ici la fin de l'année (le Cameroun, la Côte d'Ivoire, la Guinée, la
Guinée-Bissau, la Guyane, le Malawi, le Mali, le Nicaragua, le Rwanda, le Tchad et
la Zambie). L'allégement total de la dette convenu en vertu de l'Initiative en
faveur des PPTE atteindrait ainsi environ 35 milliards de dollars US sur une base
nominale (environ 20 milliards de dollars US selon valeur actualisée nette). Encore
une fois, ce montant augmentera en raison de la réduction de la dette au titre de
l'APD et de notre engagement à annuler la dette commerciale admissible.
- Le point de décision de ces pays dépendra de leur engagement en matière de
réduction de la pauvreté et de croissance économique, c'est-à-dire l'état
de préparation de stratégies de réduction de la pauvreté et du rendement de ces pays
au chapitre des programmes du FMI. Les progrès réalisés quant à la mise en uvre
de ces engagements seraient évidemment minés par des conflits armés ou des troubles
politiques.
- Il reste 20 PPTE. De ce nombre :
- quatre pays (l'Angola, le Kenya, le Vietnam et le Yémen) ne devraient pas
atteindre le seuil d'endettement donnant droit à une aide accrue au titre de la
réduction de la dette des PPTE;
- deux pays ont décidé de ne pas demander d'allégement en vertu de
l'Initiative améliorée (le Ghana et la RDP lao);
- deux pays participant aux programmes du FMI sont en voie d'appliquer les mesures
nécessaires. D'ici là, ils bénéficient de l'allégement classique de la
dette (Conditions de Naples du Club de Paris [67 %]) dans le cadre du programme du
FMI (Madagascar et Sao Tomé-et-Principe);
- 12 pays n'ont pas convenu à l'heure actuelle de programme en vertu de la
Facilité du FMI pour la réduction de la pauvreté et la croissance; ils devront donc
fournir les preuves nécessaires avant d'atteindre le point de décision (le Burundi,
l'Éthiopie, le Libéria, le Myanmar, le Niger, la République centrafricaine, la
République du Congo, la République démocratique du Congo, la Sierra Leone, la
Somalie, le Soudan et le Togo). Le rythme de progression de ces pays vers le point de
décision variera sensiblement. Un petit nombre d'entre eux sont tout près du point
de départ. Dix pays sont au cur de conflits. Certains sont victimes de troubles
politiques ou d'instabilité macroéconomique. Dans ces circonstances, bon nombre
d'entre eux sont encore incapables de s'engager à appliquer le cadre des PPTE
qui vise à faire en sorte que les ressources dégagées par l'allégement de la
dette soient utilisées pour réduire la pauvreté à l'intérieur d'un cadre
stratégique axé sur la croissance économique.
Source: Canada, Ministère des Finances.