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University of Toronto

Déclaration sur la prévention des violences sexuelles dans les conflits

Aylesbury, près de Londres, 11 avril 2013
(Traduction de l'anglais fournie par la Ministère des affaires étrangères de la République Française)
[Version anglaise]

1. Les ministres ont approuvé les efforts déployés ces dernières années par les États, les Nations Unies et d'autres organisations intergouvernementales, les organisations de la société civile au niveau local et international et les organisations non gouvernementales pour prévenir les violences sexuelles dans les conflits armés et y apporter une réponse. En dépit de ces efforts, des violences sexuelles continuent d'être commises dans les conflits armés. Dans certains conflits, elles sont systématiques ou commises à grande échelle, atteignant des niveaux de brutalité terrifiants. Les ministres reconnaissent qu'il incombe au premier chef aux parties aux conflits armés de prendre toutes les mesures possibles pour assurer la protection des civils ; toutefois, comme les ministres l'ont noté à Washington en avril 2012, le G8 a un rôle important à jouer dans la prévention et le règlement des conflits, notamment en appuyant la mise en œuvre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les femmes, la paix et la sécurité et sur les enfants et les conflits armés. Les violences sexuelles dans les conflits armés comptent parmi les atteintes les plus graves au droit humanitaire international et au droit international des droits de l'homme. La prévention des violences sexuelles dans les conflits armés relève par conséquent tant du respect des droits humains universels que du maintien de la sécurité internationale, comme l'énonce la résolution 1820 du Conseil de sécurité des Nations Unies. Les ministres ont souligné la nécessité de renforcer l'action contre ces crimes qui perdurent, notamment en réfutant le mythe selon lequel les violences sexuelles dans les conflits armés sont un phénomène culturel, une conséquence inévitable de la guerre ou un crime mineur.

2. Les ministres ont reconnu que des mesures positives avaient été prises pour faire répondre de leurs actes les auteurs de ces crimes, tant au niveau national qu'international, notamment grâce au travail de la Cour pénale internationale et de tribunaux spéciaux et mixtes, ainsi que des chambres spécialisées de juridictions nationales. Cependant, dans les situations de conflit et d'après-conflit, les systèmes judiciaires nationaux étant fortement affaiblis, seul un nombre restreint de criminels sont traduits en justice. Les ministres ont rappelé que le droit international humanitaire interdit de longue date les violences sexuelles dans les conflits armés et que les violences sexuelles, lorsqu'elles sont commises dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique dirigée contre une population civile, peuvent constituer un crime contre l'humanité et un élément constitutif du crime de génocide. Ils ont également rappelé les cadres normatifs existants établis en vertu des résolutions 1261 (1999), 1325 (2000) et 1612 (2005), de toutes les résolutions ultérieures concernant les enfants dans les conflits armés et les femmes, la paix et la sécurité, ainsi que la résolution 1983 (2011) du Conseil de sécurité des Nations Unies. Les ministres ont exprimé leur soutien sans réserve au travail effectué par les Nations Unies, notamment par des femmes, pour lutter contre les violences sexuelles dans les conflits armés, et aux mandats de la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies pour les enfants et les conflits armés, et de la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit. Ils ont notamment salué le travail que la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit effectue pour renforcer la cohérence et la coordination de l'action des Nations Unies en la matière, par le biais de la Campagne des Nations Unies contre la violence sexuelle en temps de conflit, ainsi que son action pour que ces pays assument leur part dans la lutte contre ce fléau.

3. Les ministres ont réaffirmé que la promotion et la protection de l'ensemble des droits humains et des libertés fondamentales des femmes et des enfants étaient essentielles dans la lutte contre toutes les formes de violences sexuelles commises lors des conflits. Les actions visant à mettre un terme aux violences sexuelles dans les conflits doivent également promouvoir la participation active des femmes à la vie politique, sociale et économique, à égalité avec les hommes, notamment dans l'ensemble des processus de prévention et de règlement des conflits, de justice transitionnelle et de réforme du secteur de la sécurité. Les ministres ont souligné combien il était important de répondre aux besoins des hommes et des garçons victimes de violences sexuelles dans les conflits armés, ainsi que des personnes qui ont subi un traumatisme secondaire en étant forcées à assister à des violences sexuelles perpétrées contre des membres de leur famille. Les ministres ont également souligné qu'il importait de faire participer les hommes et les garçons en tant que partenaires pour prévenir et éliminer les violences sexistes, notamment les violences sexuelles commises lors d'un conflit armé, et mettre un terme à la stigmatisation des victimes en encourageant un changement d'attitude et de comportement, par la promotion de l'égalité entre hommes et femmes.

4. Les ministres ont rappelé que le viol et les autres formes de violences sexuelles graves commis lors des conflits armés constituaient des crimes de guerre ainsi que des violations graves des Conventions de Genève et de leur premier protocole. Les États sont tenus de rechercher et de poursuivre (ou de remettre à la justice) toute personne, quelle que soit sa nationalité, soupçonnée d'avoir commis ou ordonné une violation grave de ces conventions. En conséquence, les personnes accusées de violations graves doivent être traduites en justice, dans le respect des règles internationales. Les auteurs de violences sexuelles dans les conflits armés ne doivent pouvoir trouver refuge nulle part.

5. Les ministres ont reconnu qu'il était impératif de prendre de nouvelles mesures au niveau international pour mettre un terme aux violences sexuelles dans les conflits armés, remédier à l'impunité qui entoure ces crimes et fournir des services exhaustifs de soutien aux victimes, qu'elles soient des femmes, des filles, des hommes ou des garçons. Les ministres se sont engagés à travailler ensemble et avec d'autres partenaires dans le cadre d'une campagne globale et concertée pour sensibiliser le public à ces crimes, pour renforcer la volonté politique internationale au plus haut niveau afin de lever les obstacles au contrôle et au signalement efficaces des situations de violences sexuelles dans les conflits armés, pour améliorer le soutien au victimes et pour renforcer les capacités nationales et internationales de lutte contre les violences sexuelles dans les conflits armés, notamment en enquêtant sur les crimes et en poursuivant leurs auteurs. À cet égard, les ministres se sont engagés, dans le cadre de leurs priorités et programmes nationaux respectifs, à prendre les mesures énoncées ci-dessous.

6. Les ministres ont reconnu qu'il était essentiel d'assurer des enquêtes et une collecte d'information efficaces sur les actes de violence sexuelle commis lors des conflits armés, pour traduire leurs auteurs en justice et garantir un accès à la justice aux victimes tout en préservant leur sécurité, leur dignité et le respect de leurs droits humains. L'adoption d'une approche commune conforme au droit international applicable pour les enquêtes et la collecte d'informations assurées par différents acteurs concernant les violences sexuelles dans les conflits armés permettrait d'éviter que les efforts d'intervenants multiples ne se chevauchent ou n'aboutissent à affaiblir ou détruire des éléments de preuve ou des informations, et pourrait apporter une aide aux victimes tout au long des processus d'enquête et de collecte d'informations. Reconnaissant la nécessité de lignes directrices uniformes, les ministres ont salué les objectifs du projet de protocole international sur les enquêtes et la collecte d'informations sur les violences sexuelles dans les conflits armés et ont approuvé sa préparation.

7. En défendant les droits des femmes et des enfants et en s'opposant aux violences sexuelles commises lors des conflits armés, les associations et réseaux de femmes, en particulier les organisations de défense des droits des femmes, jouent un rôle particulièrement important pour enquêter et collecter des informations sur les cas de violences sexuelles et permettre aux victimes d'obtenir réparation, notamment devant la justice. Ces organisations peuvent également renforcer la protection de première ligne de ces victimes ainsi que les services dont elles bénéficient et faciliter leur accès à la justice. Les ministres ont reconnu la nécessité de mieux protéger les défenseurs des droits de l'homme et se sont engagés à aider les pays touchés par un conflit à élaborer et mettre en œuvre des plans d'action nationaux, avec la participation d'organisations locales, pour fournir cette protection. Ils sont également convenus d'améliorer la coordination de leurs efforts de protection dans les pays concernés, en s'appuyant le cas échéant sur des lignes directrices existantes telles que celles définies par l'UE en matière de soutien et de protection des défenseurs des droits de l'homme.

8. La fourniture de services adaptés et accessibles, notamment un soutien médical, psychologique, juridique et économique, est essentielle pour permettre aux victimes de violences sexuelles dans les conflits armés de se réadapter, de se réinsérer et d'obtenir justice. Cela revêt une importance particulière pour les enfants victimes de violences sexuelles, souvent exclus de programmes axés sur les adultes. Les ministres ont souligné que toute forme d'aide humanitaire devait demeurer impartiale et respecter le principe du « primo non nocere » ainsi que les Directives en vue d'interventions contre la violence basée sur le sexe dans les situations de crise humanitaire publiées par le Comité permanent interorganisations des Nations Unies, les Normes minimales pour la protection de l'enfance dans l'intervention humanitaire, et les principes directeurs des Nations Unies sur l'aide humanitaire. Ils ont souligné qu'il importait d'inclure une réponse globale en la matière dans la programmation relative aux conflits, à l'aide humanitaire, au développement au sens large et à la santé mondiale, et de prévoir des financements appropriés. Les ministres ont insisté sur la nécessité de renforcer le financement de l'aide aux victimes et ont appelé la communauté internationale, notamment le G8, à intensifier ses efforts pour mobiliser ces ressources, notamment au bénéfice de programmes tels que le Fonds au profit des victimes de la Cour pénale internationale et de ses partenaires chargés de l'exécution des projets.

9. Les ministres ont souligné combien il était important de mieux financer la prévention et l''intervention et appelé la communauté internationale, notamment le G8, à mobiliser ces financements dès le début du conflit ou de la crise humanitaire. Les ministres sont également convenus de contribuer à collecter des données sur les manières efficaces de prévenir les violences sexuelles dans les conflits armés et les crises humanitaires et d'y apporter une réponse. Ils sont également convenus de soutenir les efforts de réforme des Nations Unies visant à ce que les institutions de l'ONU et leurs partenaires respectent les normes établies sur les interventions en cas de violences sexistes commises lors des crises humanitaires.

10. Les ministres ont souligné que l'action en faveur de la paix et de la sécurité, y compris en situation de crise humanitaire, de transition et de réforme après un conflit, doit inclure des dispositions visant à prévenir les violences sexuelles dans les conflits armés et à y apporter une réponse, notamment en tenant responsables les auteurs de ces violences et en apportant justice et réparation aux victimes. Les ministres sont convenus que les participants aux négociations de paix et de cessez-le-feu soutenues par les membres du G8 devaient inclure des femmes et reconnaître explicitement la nécessité de prévenir les crimes de nature sexuelle dans les conflits armés, d'y faire face et d'en réduire le nombre. Les ministres ont également souligné la nécessité d'exclure les crimes de nature sexuelle commis lors des conflits armés des dispositifs d'amnistie. Ils se sont engagés à favoriser la participation des femmes à toutes les négociations de paix et à toutes les actions pour la consolidation de la paix, la prévention et l'obligation de rendre des comptes, et à veiller à ce que ces efforts prennent également en compte les besoins et les droits des femmes et des enfants. À cet égard, les ministres se sont engagés à aider les pays touchés par un conflit à veiller à ce que leurs futurs programmes de réforme des secteurs de la sécurité et de la justice prennent en compte les besoins des femmes et des enfants, soient conçus pour lutter contre la violence sexiste, notamment sexuelle, et favorisent la pleine participation des femmes. Les ministres ont reconnu la nécessité de promouvoir des institutions nationales et des réformes juridiques permettant de lutter contre les violences sexuelles et de les prévenir, notamment en apportant, en tant que de besoin, un soutien aux prestataires de services tant publics que privés. Ils se sont engagés à appuyer le déploiement d'experts internationaux, à la demande des gouvernements d'accueil, dans les situations particulièrement préoccupantes en ce qui concerne les violences sexuelles commises lors d'un conflit et d'aider les Nations Unies et les organisations internationales à renforcer les capacités nationales en matière judiciaire, d'enquête pénale et juridique pour accroître le nombre de criminels traduits en justice.

11. Les ministres ont reconnu que les actions menées contre les violences sexuelles commises lors des conflits armés devaient être conformes à la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies et aux résolutions ultérieures sur les femmes, la paix et la sécurité, et appuyer les efforts globaux visant à mieux les faire appliquer. Les ministres ont reconnu le rôle important des plans d'actions nationaux dans la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies, et se sont engagés à réviser régulièrement ces plans et à aider les pays touchés par un conflit à les élaborer.

12. Les ministres sont convenus que les gouvernements devaient, le cas échéant, réviser les instructions et la formation reçues par les personnels de l'armée et de la police afin qu'elles incluent la formation d'un personnel approprié déployé sur les théâtres des opérations en ce qui concerne les conséquences des viols et d'autres formes de violences sexuelles commis dans les situations de conflit ou après un conflit. Cette mesure doit également concerner, si nécessaire, la formation et le soutien fournis aux forces d'autres États. Les ministres appuient également les efforts déployés par les Nations Unies et d'autres instances multilatérales pour veiller à ce que cette formation soit dispensée aux forces internationales de maintien de la paix. Reconnaissant la contribution particulière apportée par les conseillers pour la protection des femmes et pour la protection des enfants dans la lutte contre les violences sexuelles, les ministres ont appelé à leur déploiement dans le cadre des opérations et missions de maintien de la paix concernées, menées par Nations Unies ou d'autres entités. À cet égard, les ministres ont souligné qu'il importait que ces conseillers pour la protection des femmes et des enfants aient reçu une formation appropriée et que leurs postes, lorsqu'ils sont déployés dans le cadre de missions de maintien de la paix des Nations Unies, soient inclus dans le budget central de ces missions.

13. Les ministres ont reconnu qu'une approche coopérative dans la lutte contre les violences sexuelles dans les conflits armés, qui, bien souvent, ne sont pas considérées comme prioritaires par rapport à d'autres préoccupations urgentes liées à la sécurité et aux conflits, aurait certainement un impact plus fort. Il est essentiel de renforcer la coordination, en particulier à l'appui du travail des Nations Unies et d'autres instances multilatérales concernées, afin que les efforts internationaux portent leurs fruits. Les ministres ont réaffirmé leur soutien au mandat de la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, notamment par leur travail de plaidoyer auprès des gouvernements et des autres parties aux conflits armés pour qu'ils prennent et tiennent des engagements dans des délais précis en matière de lutte contre les violences sexuelles, et par la mise en place d'outils et de ressources adaptés, y compris par d'autres autorités compétentes. Les ministres ont également affirmé leur appui au travail effectué par l'équipe d'experts sur l'état de droit et les violences sexuelles dans les conflits mandatée par la résolution 1888 du Conseil de sécurité des Nations Unies.

14. Les ministres ont reconnu la nécessité d'intensifier les efforts des Nations Unies pour lutter contre les violences sexuelles dans les conflits armés et se sont engagés à renforcer leur appui à la Représentante spéciale dans sa présidence de la Campagne des Nations Unies contre la violence sexuelle en temps de conflit et à la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies pour les enfants et les conflits armés dans la mise en œuvre de son mandat de lutte contre les violences sexuelles commises à l'égard des enfants durant les conflits armés.

15. Les Ministres ont reconnu la nécessité de continuer à rester vigilants sur cette question et d'évaluer attentivement la mise en œuvre des engagements pris ci-dessus.

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Source: Ministère des Affaires étrangères de la République Française


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